Pour une bonne et douce année
par
Une fête juive n’est pas seulement un moment particulier du calendrier. C’est aussi, et peut-être surtout, une façon unique pour chacun de le vivre. C’est ce qui nous a incité aujourd’hui à vous parler de Roch Hachana à travers de courtes mais profondes réflexions. Sans nul doute que chacun y trouvera son compte.
L’usage veut qu’en ce jour chacun souhaite à son prochain une bonne et douce année. À priori l’adjectif « bonne » aurait suffi. Pourquoi ajouter « douce » ?
Chaque détail du judaïsme et de son rituel n’est pas fortuit. Il obéit à la volonté divine et est donc porteur d’une signification qui doit nous aider à mieux comprendre l’enseignement du temps que nous vivons alors. Ainsi en est-il de même ici : « bonne année » seulement n’est pas suffisant puisque même pour une mauvaise chose, le Talmud nous demande de penser qu’elle vient pour le Bien. Les épreuves qu’un homme peut connaître dans sa vie, elles aussi sont parfois vécues douloureusement bien qu’elles soient envoyées pour son bien. C’est la raison pour laquelle nous ajoutons à nos souhaits le mot « douce » : pour que le bien de l’année nouvelle soit vécu sur le mode de la douceur.
Pour la vie
On trouve dans la prière de Roch Hachana ces mots : « Souviens-Toi de nous pour la vie... pour Toi, Roi de vie... ». Et le Sfath Emeth de commenter : on ne demande pas seulement la vie mais « ...la vie pour Toi... » une vie qui ne se perdra pas dans les futilités du monde, mais entièrement consacrée à Toi pour Toi.
Matériel et spirituel
« ...inscris-nous dans le Livre de la subsistance... » demandons-nous à Hachem le jour de Roch Hachana. Le sens premier de cette requête est claire pour tout le monde. Mais nos Maîtres y apportent une deuxième signification, cette fois plus profonde, et lisent « ...inscris-nous dans le Livre et dans la subsistance... », Maître du monde donne-nous la possibilité de gagner notre pain sans pour autant délaisser la Torah. Et d’un autre côté ne nous laisse pas face à notre livre d’étude simplement parce que nous n’avons rien d’autre à faire. Nous voulons le spirituel et le matériel.
L’élection de Hachem
Roch Hochana est le jour où le peuple juif proclame la royauté de Hachem sur terre. « ...règne sur le monde dans toute Ta gloire » affirmons-nous dans nos prières. Proclamer Hachem roi sur le monde signifie qu’il existe chez nous une volonté de se soumettre à Sa loi comme nous l’aurions fait pour un souverain humain. Cette soumission va alors créer chez lui le désir de régner, c’est-à-dire d’être plus proche de nous et de nous soulager de tous nos besoins spirituels et matériels. Nous avons là un double enseignement : plus la soumission est grande et sincère, plus la présence de Hachem dans notre vie est intense. Mais la soumission c’est aussi une forme d’humilité, celle que nous devons manifester devant chaque homme pour un nouveau départ car il ne faut pas l’oublier : Roch Hachana est aussi l’anniversaire du jour de la création de l’homme.
Quelle préparation devant Hachem ?
Le Baal Chem Tov demanda une fois à son élève Rabbi Zeev Kitziss d’apprendre la signification profonde du Chofar le jour de Roch Hachana. Les « significations profondes », ce sont en hébreu les « cavanoth », terme qui désigne l’étude et la maîtrise du sens profond qui préludent à l’accomplissement d’une mitsva. Rabbi Zeev les étudia et du fait de leur grand nombre dut les noter sur un morceau de papier qu’il glissa dans sa poche pour pouvoir le lire au moment de la sonnerie. Le Baal Chem Tov n’apprécia pas le procédé de son élève et puisque le Ciel se conforme aux pensées d’un Juste, la Providence fit en sorte que Rabbi Zeev perdit son papier.
Lorsque le moment de la sonnerie arriva Rabbi Zeev glissa discrètement la main dans sa poche... pour la trouver vide. Il sentit à cet instant son cœur se déchirer, éclata en sanglots et plein d’amertume sonna du Chofar. Après la prière le Baal Chem Tov s’approcha de son élève et lui dit :
« Sache que dans le palais du Roi des rois, il existe de nombreux domaines spirituels dont l’entrée n’est possible que par une seule clef. Ces clefs sont les « cavanoth » des mitzvots. Pour chaque domaine une « cavana » est nécessaire. Cependant, il existe une clef qui ouvre toutes les portes : celle d’un coeur brisé c’est-à-dire l’humilité de reconnaître notre petitesse ».