À Abraham Heschel

 

Sitôt construits

Sitôt détruits

Les immeubles de mon temps

Ne sont pas bien résistants

Ils ont beau être armés de béton

Je ne vois en eux que d’éphémères constructions

 

La terre connaît quelques soubresauts

Et voilà qu’ils tombent en morceau

Un coup de vent

Les embruns de l’océan

Et voilà le ciment

Aussitôt rongé par le temps

 

Et pourtant depuis un moment

L’homme a un curieux passe-temps

Il construit toute sorte de monuments

De la tour de Babel

À une quelconque citadelle

De Vauban à Eiffel

De fiers édifices se dressent vers le ciel

 

Quant à moi

J’ai abandonné la pelle et la truelle

En plein milieu des champs

Et si je regarde vers le ciel

Ce n’est pas pour y grimper à l’aide d’une échelle

Ou sur le dos me coller des ailes

Je garde les plumes pour y tremper un peu d’encre

Elle noircira les feuilles qui demain s’envoleront au vent

Je ne suis qu’un modeste bâtisseur du temps