Cinquième chapitre : le train de l’histoire - fin

mardi 1er avril 2014
par  Paul Jeanzé
popularité : 35%

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« Ploc »
« Ploc »

La pluie qui tombe presque à l’horizontale vient s’égoutter sur les vitres du train qui me ramène chez moi.

« Ploc »

« Ploc »

La buée obstruant toute vision extérieure, je reporte mon regard sur ma guitare. Puis mes chaussures. Et enfin ce pantalon rouge sur lequel j’ai posé le livre que vous êtes en train de lire. Je m’extrais un instant de ma lecture, et observe quelques secondes l’homme qui vient de s’asseoir à ma droite, sur la banquette qui me fait face. Son stylo file sur le papier, s’arrête. Rature, petite virgule saute sur un point. Exclamation ou interrogation ? Pousse-toi ! Point. Virgule, ; la ponctuation s’anime dans la marge, les lettres se multiplient dans les pages quand soudain… Trois petits points de suspicion et son cahier se referme clac ! L’onomatopée fige son visage. Je n’aurais pas dû m’imaginer que j’allais lire en quelqu’un comme dans un livre ouvert. Le paragraphe est terminé.

« Ploc »

« Ploc »

« Ploc »

J’approche de la fin et nous sortons d’un tunnel. Je comprends maintenant pourquoi les gouttes de pluie commençaient à prendre leur temps. Comme ce train qui vient d’ailleurs brusquement de ralentir pour finalement s’arrêter. Dans le compartiment, l’impatience palpable qui circulait déjà entre les voyageurs se cristallise soudain en une vague d’énervement. En cet instant, le présent me pèse tellement qu’il en accélère le rythme de mon récit. Je peine à reprendre mon souffle. Le train s’est arrêté et les événements se bousculent. Tout va très vite. Tout va trop vite. Rien ne se passe et tout est déjà terminé. Pas le temps de ralentir. Des semaines que je stagne sur la fin de l’histoire et me voici maintenant dans ce train qui n’en finit pas de repartir. Démarre, s’il te plaît. Démarre !

« Ploc »

« Ploc »

Suite à un grave accident de personne…

« Ploc »

La pluie s’est enfin arrêtée. Quelques gouttes, surprises, restent à l’horizontale avant d’aller s’écraser en contrebas sur les rails et le gravier. Dans le wagon, la colère gronde. Les langues se délient et les commentaires fusent. Je m’enfonce dans mon siège sous le regard presque compatissant de l’homme au stylo qui, je ne l’avais pas remarqué, vient de reprendre une plume qui semble presque entrer en résonance avec les événements du moment. Après de longues minutes, le train se met de nouveau en mouvement. Les commentaires se font alors plus rares avant de se dissoudre dans la nervosité ambiante.


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