Seul dans Berlin

Hans Fallada (1947)
lundi 21 juin 2021
par  Paul Jeanzé
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Pâles, ils se regardaient. C’étaient de vieux amis ; leurs relations remontaient à l’époque de leurs études. Mais la peur avait surgi, et la peur avait fait naître la défiance. Ils se regardaient sans un mot.
« C’est un acteur, pensait l’avocat. peut-être m’a-t-il joué la comédie et veut-il me perdre. Peut-être est-il chargé de mettre ma loyauté à l’épreuve… Récemment, pour avoir malencontreusement accepté de défendre un accusé devant le Tribunal du peuple, j’ai eu grand-peine à me tirer d’affaire. Depuis lors, on se méfie de moi… »
« Jusqu’à quel point Erwin est-il vraiment un bon avocat ? se demandait en même temps l’acteur. Dans mon différend avec le ministre, il ne veut pas m’aider. Et maintenant il est prêt à déposer sous la foi du serment qu’il n’a jamais vu la carte. Il ne prend pas mes intérêts à cœur et agit même contre moi. Qui sait si cette carte… Partout on parle de pièges qui sont tendus aux gens… mais c’est absurde ! Il a toujours été mon ami. Un homme sûr ! »

Et tous deux réfléchissaient ; tous deux se regardaient ; tous deux commencèrent à sourire.
– Nous avons été bien sots de nous méfier l’un de l’autre !
– Nous qui nous connaissons depuis plus de vingt ans !
– Depuis les bancs de l’école.
Oui, nous avons fait bien du chemin !
– Comment en sommes-nous venus là ?… Le fils trahit sa mère, la soeur son frère, l’ami son amie.
– Mais ce n’est pas vrai pour nous.


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Des "mauvaises nouvelles" qui donnent de la voix

Mardi 07 mai 2024

En ce début de semaine, Monsieur Éric Lebret mettait sa voix au service d’une de mes nouvelles, intitulée Un bon coup de balai. Ce "comédien-voix" avait déjà mis son talent au service de deux autres "mauvaises nouvelles" :

Au bout du chemin
Très chère amie

Cher Monsieur Lebret, si vous deviez passer par ici, sachez combien votre initiative m’a touché et m’encourage à reprendre le chemin de l’écriture, chemin le long duquel il m’aura été nécessaire de quelque peu "marquer le pas" ces trois dernières années, même si mes chères poézies auront continué à m’accompagner pendant cette période.

À bientôt
Paul Jeanzé